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« PERSONAL STOP »

Le parlement en passe de verrouiller les dépenses de l’Etat

mercredi 11 novembre 2015

paru dans Le Courrier du 11-11-2015 par PAULINE CANCELA


En pleine grève des fonctionnaires et à l’aube d’âpres discussions budgétaires, la majorité de droite du Grand Conseil a ressorti sa machine de guerre. Ajourné en juin, un nouveau mécanisme de frein à l’endettement élaboré par le PLR s’apprête à passer la rampe du parle- ment jeudi soir. Il impose à l’Etat le gel des embauches (« Personal Stop ») et la limitation des dépenses tant que la dette n’est pas redescendue à 8 milliards de francs – contre 13 actuellement. La gauche annonce un référendum.

Frileux ce printemps, le PDC et le MCG sont maintenant déterminés à faire voter en urgence cette cure d’austérité voulue par le PLR, et qui rendra difficile d’adapter les charges de l’Etat à la croissance démographique notamment. « On aimerait évidemment pouvoir se passer d’un tel mécanisme, confie Béatrice Hirsch, cheffe de groupe PDC. Mais des temps difficiles s’annoncent et le canton n’arrivera pas à lancer de vraies réformes structurelles si on ne lui force pas la main. »

Pour donner une impulsion décisive au Conseil d’Etat, l’Entente veut même inscrire dans le projet de loi l’objectif du gouvernement de réduire de 5% la masse salariale d’ici à 2018 – sans se prononcer sur les mesures pour y arriver. « C’est une façon d’aider l’exécutif à prendre ses responsabilités pour assurer la pérennité de l’Etat et la qualité de la fonction publique, que cela passe ou non par une externalisation de certaines prestations non régaliennes », argumente la PLR Nathalie Fontanet. Elle reconnaît que ce renforcement du frein à l’endettement impliquera des « vrais budgets d’austérité ».

« En présentant son budget 2016, le Conseil d’Etat a oublié de préciser qu’il prévoyait aussi une augmentation de 120 postes ! » rebondit le MCG Eric Stauffer, désormais acquis à ce corset financier. Son parti n’est toutefois pas prêt à suivre sur toute la ligne, raison pour laquelle il avait lui-même joué un double jeu avant l’été en demandant d’ajourner l’objet.

« Nous voterons cette loi tant que les annuités des fonctionnaires en place sont maintenues, ce qui devrait être le cas. Mais nous sommes encore loin d’avoir voté la coupe linéaire de 5% dans les effectifs ou la semaine à 42 heures, qui seront discutées dans le cadre du budget fin décembre », prévient le député.

Quant à l’UDC, sa ligne est la même qu’en juin, inflexible : « Ce n’est pas une fronde contre les fonctionnaires, même s’ils sont les mieux payés de Suisse, mais plutôt contre le Conseil d’Etat qui ne maîtrise toujours pas la dette alors qu’elle a explosé en deux ans », déclare Patrick Lussi, chef de groupe.

De son côté, la gauche est effarée. La mesure signe selon elle la mort du service public. « Le personal stop est un projet impraticable. Aucune politique publique ne pourrait évoluer sans que cela ne soit au détriment d’une autre. Même la droite ne pourrait pas poursuivre sa politique sécuritaire », remarque la Verte Emilie Flamand-Lew.

« Ce projet de loi est dangereux. S’il passe, nous n’aurons d’autre choix que de lancer un referendum », ajoute le socialiste Roger Deneys.

« Voter ce projet en urgence est une riposte directe de la droite à la grève des fonctionnaires. Aujourd’hui, le MCG s’aligne comme supplétif du PLR », regrette pour sa part Pierre Vanek, député d’Ensemble à gauche.

L’Alternative rose-rouge-verte est curieuse de connaître la position du Conseil d’Etat, dont le Grand argentier Serge Dal Busco dénonçait les conditions « irréalistes et irréalisables » d’un tel Personal Stop (Le Courrier du 8 juin 2015). Le vent à tourné. S’il réserve sa position aux députés, le magistrat n’est plus opposé au projet de loi. « Globalement, il va dans le sens des objectifs du Conseil d’Etat en matière de réduction des dépenses. Mais pour être praticable, il faudrait lui apporter quelques nuances sous forme d’amendements », indique son porte-parole Roland Godel.

COLLABORATION : MARIE DURAND