Adieu Fazy – bonjour le quinquennat

L’aube de la nouvelle ère politique promise à Genève par la constitution qui vient d’être approuvée, au dépit de votre serviteur, lui inspire quelques pensées aussi partielles que partiales.

Le vent du boulet vient de siffler aux oreilles des adeptes du compromis bancal de la désormais nouvelle constitution, acquise de justesse, à quelque 3’000 voix près, sur les 240’000 que compte le corps électoral genevois. Cris de soulagement et indécentes embrassades des adversaires politiques présumés ont accueilli l’annonce d’un résultat acquis du bout des lèvres et grâce aux quartiers résidentiels prenant l’avantage sur les bas loyers ayant perdu leur priorité dans le texte voté. Malgré le déferlement propagandiste ayant tenu lieu d’information du public depuis début 2012, les alliés de queue de Constituante se sont montrés incapables de mobiliser plus du tiers de l’électorat, alors que 40% de la population était, pour défaut de passeport, écartée une fois encore d’un scrutin fixant ses droits de participer à la vie civique du canton. On retiendra pour mémoire l’équation remarquable suivante : 75% de constituants ne représentent tout compte fait guère plus de 15% d’électeurs.

La campagne unitaire du front du refus de gauche, virulente pour contrer ce qui avait tout de l’étouffoir, malgré d’inévitables excès ou approximations bénignes en regard des énormités d’en face, a failli bousculer l’arrogance satisfaite de coalisés regroupant pratiquement tout ce qui comptait de politiciens, en herbe ou chevronnés. Soutenue à bout de bras militants, avec l’aide ponctuelle de quelques vétérans, nous sommes particulièrement fiers et heureux d’y avoir, avec ViVRe1, tenu notre rang, et à notre place contribué.

Si la légitimité institutionnelle du nouvel édifice juridique échappe à sa fragilité congénitale, les indispensables combats démocratiques pour lever ses équivoques et régressions risquent de lui donner rapidement un air de familiarité au patchwork qu’était devenu le fazyste de 165 ans, couturé de laborieuses conquêtes. Nous verrons à l’usage siles droits fondamentaux instillés et les bonnes intentions exhibées se révèlent de quelque appui pour contrer les freins institutionnels à la démocratie directe et à l’intervention populaire qui truffent ce texte de tonalité proprement raboteuse. A peine la nouvelle constitution proclamée, le premier acte du fringant conseiller d’Etat Maudet, qui lorgne déjà goulûment sur la présidence, a été de supprimer l’Office des Droits Humains. Voilà qui met de la couleur à leur justiciabilité !

Nous verrons également si seront pansées les blessures infligées par les coalisés de la dernière heure au tissu syndical et associatif genevois, que des fiers-à-bras auront lacéré sans scrupules. En revanche, on ne peut que se féliciter de la dynamique animée avec l’appui d’une gauche radicale rompue aux campagnes de résistance. On se prend même à espérer que l’expérience du marathon final contribuera à desserrer le garrot législatif du quorum à 7% qui étrangle, législature après législature, la diversité accusée de cette fraction et l’empêche de s’exprimer au parlement.

Dario CIPRUT, 16 octobre 2012 Militant et chercheur indépendant

2012-10-22darioCiprut_Le_Courrier_Adieu_Fazy.pdf